Lorsque vous êtes quelqu’un de (très) curieux mais que vous ne roulez pas sur l’or et que votre aura d’influence n’est pas celle d’une star de la pop américaine, soit vous raquez, soit vous avez des potes aussi geeks et nostalgiques que vous pour acheter une nouvelle console ou un jeu et vous la faire tester. Heureusement c’est mon cas. Big Up Mathieu !
Vous vous en doutez, je n’étais clairement pas indifférent lorsque Nintendo a annoncé la sortie d’une mini console de salon avec le design original de la NES telle que présentée dans nos contrées, nommée « Nintendo Classic Mini : NES » (ou NES Classic Mini). Mais lorsqu’on réfléchit un tantinet, on se dit qu’une firme comme Nintendo n’a pas pu ignorer le boum impressionnant de la mode du retrogaming, et que depuis que feu Satoru Iwata (paix à son âme !) a laissé la place à un businessman aux dents longues, nous ne sommes probablement pas en présence d’un vibrant hommage à la machine qui a rendu la société nippone célèbre, mais plutôt à un astucieux coup marketing.
Armé de méfiance, j’ai donc attendu qu’on j’aie l’occasion de l’avoir en main et de la tester pour me faire un avis dessus; et ce jour est arrivé.
Esthétisme : c’est tout trognon mignon tout plein
Avouons-le de suite : Nintendo a misé avant tout sur la carte « nostalgie », et l’aspect de la NES Classic Mini joue clairement en sa faveur. On retrouvera donc les courbes bien carrées et les couleurs sobres entre gris et noir de la NES originale, le tout en 2 fois plus petite : 130 x 100 x 42 mm pour la Classic Mini contre 254 x 203 x 64 mm pour l’originale. Sur l’avant, rien ne change (ou presque) : on retrouve les deux ports manette avec format propriétaire sur la droite, ainsi que deux boutons « Power » et « Reset », également avec une petite diode lumineuse carrée. On regrettera par contre que la trappe à cartouche ne soit pas ouvrable, ne serait-ce que pour y découvrir un petit espace vide.
À l’arrière par contre, les vieux connecteurs RGB Audio et AC font place à des sorties plus modernes : l’image et le son seront véhiculés par une prise HDMI, tandis que l’alimentation se fera par un port Micro USB, comme votre bon vieux smartphone Android. On appréciera également que Nintendo fournisse le câble HDMI et le câble Micro USB… mais pas d’adaptateur secteur. C’est petit…
La manette unique ne joue par contre pas la carte de la miniaturisation avec des dimensions identiques à la manette originale. Identiques ? Non, pas totalement… Le câble est d’une longueur intolérablement courte (environ 75 cm), ce qui n’est pas le cas, selon mes souvenirs, de la manette originale. Les ports ne sont également plus les mêmes, mais n’imaginez pas voir non plus les universels USB qui rendraient cette NES Mini Classic trop flexible…
Après avoir appuyé sur le bouton Power
L’interface du menu principal de la NES Classic Mini est d’une simplicité enfantine; ne vous attendez donc pas à une jolie présentation soignée comme le font de nombreux systèmes d’émulation. Encore une fois, la bonne excuse du « c’est du retrogaming, c’est normal que ce soit minimaliste » a très bon dos. Quelques icônes, un fond bleu uni et quelques indications, et basta.
La barre haute présente 5 icônes, dont on comprend assez rapidement qu’elles serviront à accéder à certains réglages. Une fois observées, on se rend compte que finalement, une seule est vraiment utile… Explications :
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Le réglage de l’affichage sera cette option en question : elle vous permettra de switcher entre 3 modes d’affichage, à savoir l’indémodable 4:3, le format originel du jeu (y’en a-t-il eu beaucoup sur la NES ?) ou un mode difficile à comprendre, le « Cathodique », où la console vous rajoute d’énervants traits horizontaux sensés rappeler l’affichage instable des tubes de nos vieilles TV cathodiques. Mais à part nous coller un mal de crâne, on cherche encore son utilité.
- Les réglages techniques : en principe toujours utiles, mais les possibilités données ici sont risibles. Désactiver la lecture de démos, activer l’extinction automatique ou… limiter les brûlures d’écran. Mais à part un écran Plasma, vous en connaissez beaucoup vous des écrans LCD / LED qui connaissent des brûlures d’écran vous ?
- Langues : Pratique si vous achetez votre NES Mini Classic à l’étranger ou si vous voulez jouer à Mario avec sa voix italienne. Ah non, c’est la même (cf. l’unique Super Charles Martinet).
- Informations légales : Euh… Quoi ?
- Modes d’emploi : WOW, enfin une bonne idée, intégrer l’élément qui manque dans la plupart des jeux retrogaming achetés d’occasion : le manuel. Cliquons donc sur ce bouton et découvrons… un QR CODE ?? Sérieusement ? Oui, sérieusement. En réalité, aucun manuel n’est intégré à la console, le QR code, une fois flashé avec votre smartphone, vous enverra sur une page Web dédiée. Service minimum on vous a dit.
La partie centrale du menu présente les jeux, en défilement latéral. Là aussi, on s’est pas foulé chez Nintendo : on a repris les vieilles boîtes comme illustration, choix somme toute logique. Un petit logo « 1P » ou « 2P » vous indique si vous pouvez jouer seul ou à deux, et 4 petits cercles vous indiquent également les « slots » de sauvegarde restants. Parce que oui, un des grands avantages de la NES Classic Mini, c’est la possibilité de sauvegarder à tout moment dans n’importe quel jeu ! Une pression sur le bouton B, et 4 petites cases sortent du bas de l’écran, chacune correspondant à un Slot de sauvegarde. Mais là aussi, on trouvera des choses à redire…
Un plaisir de jeu équivalent à celui de la NES originale ?
En utilisant la transmission numérique par HDMI, la NES Classic Mini améliore un point assez agréable : l’utilisation du 60 Hz (contre 50 Hz pour la machine originale), améliorant la fluidité. Évidemment, avec la faible définition des jeux NES, l’utilisation d’un câble HDMI ne changera rien, et c’est tant mieux. Les couleurs et textures de chaque jeu sont bien restitués, et on retrouve réellement le plaisir de jeu initial de la plupart des jeux sélectionnés.
Cette sélection de 30 jeux justement, est-elle judicieuse ? Eh bien je dois dire que oui : on y retrouve la plupart des plus gros Hits de la NES, avec les 3 premiers épisodes de Super Mario Bros., Pac-Man, les deux premiers Legend of Zelda ou encore l’amusant Bubble Bobble. On aurait préféré que Nintendo fasse de choix de placer moins de jeux de la même licence pour varier un peu les gameplays, et surtout proposer d’avantage de jeux 2 joueurs.
L’utilisation de la NES Classic Mini en jeu procure des sensations équivalentes à celles de la console originale, notamment par la conservation des dimensions de la manettes. On remarquera évidemment d’avantage les défauts graphiques d’un jeu des années 80 lorsqu’on joue sur un grand écran LED (eh oui, le retro c’est sur petite TV cathodique…), mais la jouabilité reste plus qu’agréable ! On soulignera juste l’incohérence complète de la méthode de sauvegarde : il vous faudra appuyer sur la touche « Reset » de la console, puis enregistrer votre partie en cours dans un des Slots de sauvegarde, puis ré-entrer dans le jeu pour continuer… On aurait donc apprécié l’ajout d’un raccourci manette ou un bouton sur la console permettant d’enregistrer la partie sans avoir à sortir du jeu !
Alors vient le moment d’en parler : une sélection de bons jeux, oui… mais seulement 30 jeux ?? Regardons-y de plus près : la plupart de ces jeux sont sous licence Nintendo (à part quelques exceptions, telles que Castlevania de Capcom), et il ne coûte donc rien à la forme nippone de placer nombre de ses jeux dans sa mini console. Une question de place ? Vous plaisantez : la plupart des jeux NES ne pèsent qu’une centaine de KiloOctets… Imaginons que Nintendo ait eu la « générosité » d’ajouter l’intégralité des manuels d’utilisation en PDF dans la console, ajoutons les espaces de sauvegarde, l’OS interne… et on imagine bien que le tout tiendrait plus que largement sur une carte mémoire de moins de 500 Mo. Le plus vexant, c’est qu’il n’y a absolument aucune possibilité d’ajouter un jeu, même par achat légal via téléchargement Web.
Vous allez me dire « Oui mais 30 jeux, en plus des bons, c’est bien quand même ! ». Je suis d’accord avec vous, mais il ne coûtait pas grand chose à Nintendo d’offrir quelques jeux de plus afin de faire durer le plaisir plus longtemps. Et en même temps, cela offre une grande marge de manœuvre pour sortie une « V2 » de la mini console avec une autre sélection de jeux…
Conclusion : un bon plan que cette NES Classic Mini ?
Si vous avez lu l’ensemble de cet article, vous vous doutez déjà de la réponse que je vais vous donner : oui, pour moi la NES Classic Mini est ce qu’on peut appeler une « arnaque », même si le mot est probablement un peu fort ici (c’est mon côté Marseillais).
Premièrement, l’objet en lui même n’a que peu de valeur : même si le boîtier est effectivement très mignon et agréable à voir, le contenu est minime : un boîtier en plastique, une carte-processeur interne qui doit être de puissance équivalente avec un Raspberry Zéro (vendu 5€), une carte mémoire de capacité mini et un peu de câblage. En rajoutant quelques câblages, cela m’étonnerai que l’on excède les 10€ de matériel, manette comprise !
De même pour l’unique manette (une 2e d’office n’aurait pas été de trop…) : la longueur de son cordon est une faute impardonnable, à la limite du mesquin. Sachant que la NES Classic Mini ne fonctionne qu’en HDMI, et donc avec une TV moderne de taille souvent respectable, cela impose soit d’acheter une rallonge compatible avec le connecteur de la manette (donc bien plus cher d’une simple rallonge USB), soit un câble HDMI assez long, soit d’accepter de s’exploser les yeux, la tête collée à un mètre de votre écran. Lorsqu’on était petits sur une TV de 33 cm, ça pouvait passer, mais aujourd’hui… Nintendo aurait-elle investi dans l’industrie ophtalmologique ?
Mais surtout, la bibliothèque fixe de 30 jeux achève de me décourager. Si encore il était possible d’utiliser des jeux originaux pour NES, modifier la carte mémoire ou même connecter votre NES Classic Mini à Internet pour acheter des jeux sur le Nintendo Store, pourquoi pas ? Mais là, votre console restera totalement fermée à tout élargissement ou mise à jour future (même payante) de la bibliothèque.
Mais le pire, c’est que ça marche : la mini console retro de Nintendo a fait un terrible tabac, et semble continuer… Comparée à elle, j’aurai une préférence certaine pour la Mini MegaDrive de Sega sortie pour fêter les 25 ans de la console, et dont on a beaucoup moins entendu parler. Et pourtant, pour le même prix (60€ env.), on a : la mini console avec 80 jeux 16 bits intégrés, 2 manettes sans fil et SURTOUT un port lecteur pour les jeux MegaDrive originaux ! Avouez que pour le même prix, y’a pas photo…
Et surtout, après avoir découvert le système RecalBox (voir notre article sur la RecalBox ou notre Tuto vidéo), on hallucine de voir le succès de ce très gros coup marketing de Nintendo, alors que pour le même prix, vous aurez accès à des milliers de jeux sur la plupart des consoles des années 80 et 90 ! Et si vous avez peur de ne pas savoir vous construire vous-même votre propre RecalBox, regardez notre tuto vidéo, vous verrez, c’est enfantin… Mais si vous préférez tout de même offrir votre argent à Nintendo, à vous de voir. Laissez-moi devinez, vous possédez aussi des produits Apple vous, non ?